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blouses-rouges
14 juin 2009

japonmusashi@hotmail.fr

DOULEUR D’ENFANT

Le milieu de la nuit est difficile, je ne compte plus les fois. Maman est assise, elle explique, parle mais ils ne l’écoutent pas, elle craque, pleure, c’est dur de dire la vérité sans être crue. Elle n’a plus de force. Les hommes en blanc m’emmènent, il y a des lumières partout, les murs changent de couleurs, ils sont bleu ou vert avec l’odeur de menthe comme chez le dentiste. Où suis-je ? Il y a une grande salle je veux voir maman. Un homme me dit de m’allonger sur le coté, il a une grande aiguille qu’il m’enfonce dans le dos, j’hurle, pleure : «  j’ai mal, ca fait mal arrêtez ! ». Je ne rentrerais pas tout de suite à la maison.

Papa conduit, on va à paris pour la première fois, je me souviens des lumières oranges sous les ponts, on ne voit pas le bout du tunnel, il est tôt, le ciel est bleu mais je suis bien couvert. Je rentre dans un vieux bâtiment, papa présente la lettre du médecin. Il est fort mon papa, personne ne peut le battre.

Il y a une pièce on me met des tuyaux écœurants dans le nez j’ai envie de vomir, ça m’étouffe, je regarde l’horloge derrière la vitre où se trouve papa, le temps ne passe pas vite, tout une matinée.

Plus tard, on décidera de faire des radios, je dois boire une potion au gout de fraise, il y en a trop mais je dois faire les radios dans une salle bizarre sans lumière, seules les machines  éclairent. Il faudra opérer mais « c’est quoi une opération ». Je devrais encore rester à l’hôpital.

Je me souviens de ces nuits froides et glacées sous la lune blanche. Une lumière dans l’ombre de cette chambre. Les images de mon opération m’apparaissent comme des flashes des images ou des symboles. Ma mère me manque terriblement et pourtant elle est là tout près dans une chambre en face de l’hôpital.

Ce qui me fait peur c’est la nuit, les cris de ma voisine, les infirmières entrent et allument brutalement. Les lumières m’aveuglent, me réveillent et les appréhensions, les angoisses resurgissent «  Où est maman ? Que fait-elle ? Encore quelques heures et je la reverrais.

Parfois les soignantes n’allument pas, tirent le rideau dans le noir, la petite fille crie encore plus, hurle de douleur,  sans haine, sans crainte, sans appel, seulement un cri perdu dans la pénombre.

Il y a des tuyaux des bandages qui m’apparaissent comme des images.

Un jour, on m’a emmené avec mon lit glissant sans bruit  dans les couloirs bleus,

je suis entré dans une salle encore plus froide, sans vêtements, la table et les lumières étaient encore plus lumineuses que dans ma chambre. J’avais mal au dos. Une personne me mit un masque avec une odeur qui remonte dans le nez, j’ai tourné la tête mais il avait trop de force.  Une petite luciole se mit à apparaître dans le noir  comme quand on ferme les yeux après avoir fixé l’ampoule de la maison. Soudain, elle s’est envolée.

J’entends des voix, des machines, des outils mais je ne veux pas ouvrir les yeux, je préfère dormir car je suis encore fatigué.

Quand je les ai ouverts, je me  retrouve dans un endroit où il fait froid sans couverture avec seulement  un drap sur moi. La pièce est à peine éclairée, il y a une femme endormie, elle ne bouge plus et un homme avec les cheveux blancs de l’autre coté. « C’est ça un  mort ? »

Il y en a plein d’autres encore.

Je veux refermer les yeux pour me rendormir, pour revoir la luciole. Je les ouvre ; maman est revenue, elle me parle mais son visage au dessus de moi est flou j’entends  sa voix. Je n’ai pas mal mais un tuyau me gêne dans la gorge, je ne bouge pas pour ne pas arracher mes fils.

Je m’en fiche de la douleur, il n y en a pas, maman est à coté plus rien ne peut m’arriver.

Des cadeaux il y en a plein ma chambre si bien que j’ai eu les deux mêmes ours en peluches et toute la collection des « bio man » mon rêve, être fort comme ces robots pouvoir m’envoler avec leur costume et jouer avec mon frère. J’ai pu le voir quelques heures mais il a préféré les jouets dans la salle d’attente, je veux le serrer fort mais les voitures l’intéressent plus. Il est parti, j’étais triste mais je n’ai pas pleuré et lui non plus, on va se revoir bientôt maman a dit.

Mes tantes ont de grands sourire, le même que maman, les mêmes expressions, le même sourire et ce regard qui vous cajole, plein de douceur, une odeur fraiche du dehors enveloppe leurs bras. Comment pourrais-je m’en séparer, je veux que le temps s’arrête, avoir de super pouvoirs pour ne plus être seul la nuit, fort comme un homme et tout oublier. La nuit tombe déjà, il reste maman, mamie, papy et papa. J’entends maman dire « il dort on va s’en aller », je ferme les yeux simplement pour implorer le marchand de sable, être au plus vite à demain matin. Il se dirige peut être simplement vers une machine à café, j’aperçois vaguement maman dans mes rêves s’éloigner à coté de papa dans un long couloir imaginaire, ils rient et vont certainement revenir.  Je comprends le manque, le besoin d’avoir quelqu’un .J’ouvre les yeux ma grand-mère tente de partir mais mon grand père sourd, ne l’entend pas, il va peut être rester, m’enlever de là, me secourir, me faire dépasser cette chambre, me ramener à la maison. Il reste là, le regard vide puis soudain se lève, il semble triste et rêveur, je les imagine encore pas loin, je profite encore de leur présence protectrice, je savoure ce moment où l’odeur est à coté de moi, je les aime tellement, j’ai tant besoin d’eux.

Ils sont sans doute avec les infirmières mais leurs mains chaudes sont  loin, leurs bisous et le réconfort n’est plus, tout redevient froid, les bords métallique de mon lit sont comme une prison, mes tuyaux me gènent, je gèle ici, je n’en peux plus, je veux « maman » que  quelqu’un m’aide, j’ai peur, il y a des zones d’ombres, pas de lumière. Je crie, je n’arrive plus à respirer avec colère je crache toute l’air, mes larmes ne cessent de couler, je n’en peux plus, je souffre mais je ne sais pas pourquoi rendez moi ma chaleur, mes bras, mes sourires, mon soleil. Je suis abandonné, seul, j’ai peur de ne pas les revoir, il n’y a rien qui me rappelle la maison, je suis perdu, je ne sais pas quoi faire, il n’y a personne.

Mes cris ont du sans doute alarmer les hommes blancs et leurs masques , ils sont plusieurs , ils tentent de me calmer , me saisissent , je me débat , ils prennent deux bracelets, que vont’ ils faire avec ça ?« non qu’est ce que c’est ? » ils m’attachent, je ne peux pas bouger, je ne peux pas sortir, il ne peuvent pas me laisser comme ça , il n’y a pas de soignant qui restent, personne ne me comprend , ils ne parlent pas ,  ils tournent le dos et s’en vont , il n’y a pas  de réconfort, pas de câlins , ils sont plus forts que moi , je ne peux rien dire , je dois rester tranquille , je dois penser à maman essayer de revenir à demain matin , m’imaginer son arrivée et oublier cet incident.

Pendant cette nuit là ,j’ai arraché tous les tuyaux, perfusions et je suis resté attaché toute la nuit.

Dans le miroir en face de moi, je vois un petit garçon maigre, fragile avec au milieu du ventre un trou béant fermé par une cicatrice, il y a un vide quelqu’un a ouvert puis refermé. L’infirmière la recouvre tous les jours d’un pansement blanc, sa couleur est violette entourée d’agrafes me dit elle. Certaines femmes en blanc portent des masques, d’autres non, elles m’aident à me laver ou me laissent tout seul. Où est ma chambre avec mes jouets ? Elle me manque ma maison, ma baignoire où je joue avec mon frère, je veux voir mon frère mais il ne peut pas rentrer, il est trop petit me dit’ on. Je ne sais pas comment me laver, où sont mes affaires, une gentille femme m’aide mais l’autre habillée en blanc ne veux pas elle dit : « il est grand, il faut qu’il se débrouille », elle se dispute, je suis perdu et pourtant une est plus gentille, qui dois je écouter ? Je veux voir maman, elle va m’aider, j’ai peur, je suis triste dans cette chambre bleue, les néons me réveillent la nuit quand elles rentrent. Je ne reconnais plus rien dans cet endroit tout est bizarre comme dans un rêve. Quand je mange mon ventre est lourd, j’ai envie de vomir, je n’ai pas faim et pourtant je dois manger, je suis coupé en deux, ma cicatrice me tire quand je suis assis sur mon lit.

Le gentil docteur qui m’avait tout expliqué avec un schéma simple à regarder quand il rentre dans la chambre, il me demande toujours comment je vais. Je ne dis rien, je ne parle pas de ce qui se passe.

Il y a des dames qui viennent me chercher, elles veulent m’emmener voir un spectacle  mais je ne veux pas sortir de ma chambre, je ne connais pas l’extérieur, les couloirs sont grands, j’ai peur de me perdre, maman va s’inquiéter ? Elle ne va pas savoir où je suis.

Finalement, maman m’accompagne, je ne veux pas jouer, et être avec les autres enfants ils me font peur certains ont des poils sur le visage, d’autres sont comme dans mes cauchemars des monstres, ils ont plus de tuyaux que moi, plus de bandages, certains sur la tête, d’autres sur le bras et ne peuvent pas marcher, il y a un fauteuil avec des roues , moi j’ai la main de ma maman ou ses bras fort qui me portent , son corps est chaud , elle sent bon , c’est la plus belle. Quand je suis avec elle rien ne peut m’arriver, elle sait tout faire, je l’aime tellement et encore plus quand je ne l’ai pas vue, son blouson ses vêtements sentent parfois le frais du dehors, je veux sortir, prendre l’air mais je ne peux pas. Maman est gentille avec les autres enfants, je suis jaloux «  regarde moi, que moi car tu vas partir et je n’aurais pas profité avant le soir.

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  • Anamnésis est né quelque part dans les années quatre-vingt. De un à cinq ans, il joue à cache cache avec la mort dans les hôpitaux et heureusement pour nous il en réchappe. De cette entrée dans la vie douloureuse nait le désir d’aider autrui, de restituer
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